Dramaticules - Pas, Pas moi, Berceuse - Beckett
Pas, Pas moi, Berceuse
Dramaticules féminins
de Samuel Beckett
Mise en scène
Stéphane Verrue
Avec
Gaëlle Fraysse
Florence Masure
Arlette Renard
Scénographie José Froment
Lumière Nathalie Perrier
Création sonore Mathieu Chappey
Costumes Catherine Lefebvre
Durée : environ 1h00
Coproduction cie avec vue sur la mer / Théâtre d'Arras.
Avec le soutien de l'Hospice d'Havré / Ville de Tourcoing.
La cie avec vue sur la mer reçoit le soutien de la DRAC Nord – Pas de Calais, du Conseil Régional Nord – Pas de Calais, du Conseil Général du Pas de Calais, et de la Ville d'Arras
Une trilogie féminine Samuel Beckett écrivit trois pièces pour une comédienne britannique d'exception, Billie Whitelaw. A l'occasion des célébrations du centenaire de la naissance de ce grand poète irlandais (qui bouleversa l'écriture théâtrale avec En attendant Godot en 1953), nous avons voulu explorer ces trois dramaticules féminins, face trop peu connue d'un écrivain plutôt… masculin. Trois formes brèves. Trois propositions d'une étrangeté troublante. Trois moments singuliers de poésie visuelle.
Pas, Pas moi, Berceuse... Stéphane Verrue
Stéphane Verrue
Pas, Pas moi, Berceuse... dramaticules.
Pas – (1975)
Comprenne qui pourra, telle est l'avant-dernière phrase de la dernière pièce de Beckett (Quoi où,1983) avant un J'éteins ferme et définitif. Cette phrase pourrait également clore Pas, un des dramaticules les plus énigmatiques de l'auteur.
Une femme en haillons arpente la scène, de long en long, traçant le signe de l'infini à rebours, comme pour remonter le temps. Elle s'assure d'entendre le bruit de ses pas et ne cesse de ressasser tout ça, titre originel de la pièce.
Qui est-elle, cette femme ? Beckett brouille les pistes entre une mère, sa fille May, une autre mère et une autre fille… Amy (anagramme évident). Qui parle à qui ? de qui ? quand ? Le personnage que nous, spectateurs, voyons est-il seulement là ?
Et qu'est-ce donc que ce tout ça ? Un deuil impossible à faire ? Un secret indicible - voire innommable - impossible à porter ? Ou encore le mystère même de l'existence ?
On a souvent parlé, à juste titre, de fantômes au sujet de cette pièce. Mais qu'est-ce qu'un fantôme ? L'apparition surnaturelle d'un être disparu ? Ou la présence obsessionnelle d'un mort enterré dans un vivant ? Ou… les deux ?
Ce mystère agnostique et nocturne nous saisit par son inquiétante étrangeté.
Pas moi – (1972)
J'ai connu cette femme en Irlande (…). Il y en avait tant de ces vieilles qui trébuchaient dans les sentiers, dans les fossés, auprès des haies (…). Et cette femme, je l'ai entendue dire ce que j'ai écrit dans Pas moi. Je l'ai entendue vraiment. Voilà ce que déclarait Samuel Beckett à Deirdre Bair, sa première biographe.
Dans l'obscurité, seule une bouche. Cataracte de mots, lambeaux de phrases apparemment confuses, et pourtant… Comme toujours chez l'auteur, « ça » raconte une histoire… Naissance prématurée, père et mère fantômes, orphelinat, errances, supermarché, tribunal, larmes, matin d'avril… Mais schizophrénie en direct (Quoi ? Qui ? Non, elle ! ELLE), perte de la sensation du corps… Seule la bouche, la bouche, comme folle, boxant, crachant ses mots. Descente vertigineuse. S'accrocher à quoi ? Et qui parle ?
Le plus extrême des textes théâtraux de Beckett, entraînant la comédienne dans une action extrêmement périlleuse et mettant le spectateur dans une situation dérangeante voire angoissante. Abolition de l'espace. Seule la bouche éclairée. Déchirure, plaie rouge vagissante, éructant sa diarrhée verbale. Seul point éclairé flottant tel un papillon fou dans l'obscurité.
Berceuse – (1981)
Dernier dramaticule féminin de Beckett. Une femme vieillie avant l'heure, quasiment muette, dans un rocking-chair. Un faible Encore et le fauteuil se met en mouvement en même temps qu'une voix (la sienne ?) se fait entendre. Dès que le balancement cesse, la parole s'éteint. Un faible Encore permet, à plusieurs reprises, de relancer le mouvement et de faire revenir la voix. Que raconte-t-elle ? Une vie d'errance totalement solitaire. Après l'errance et la quête, pathétiquement modeste, d'un (d'une) autre comme elle, un peu comme elle, le retour à la maison et là, quête à nouveau, à la fenêtre cette fois, d'un signe de vie quelque part (un store levé). Finalement, ne trouvant rien ni personne, ne pouvant donc valider sa propre existence, la femme se résigne à rejoindre le fauteuil à bascule dans lequel sa mère, bien avant elle, finit ses jours.
On pense à Pozzo (En attendant Godot) et ses grandes phrases définitives (Elles accouchent à cheval sur une tombe). On pense aussi à un autre héros (!) beckettien, Murphy, qui se ligotait dans un rocking-chair pour mettre en route sa pauvre tête…
Balancement lancinant, comme un vieux rituel pour tenter d'entrer en relation avec des spectres, des êtres chers depuis longtemps disparus, ou, simplement, son propre esprit. Corps comme une urne vide affamée, affamée d'âme, la voix semblant apporter l'apaisement à la souffrance du corps jusqu'à l'endormissement final.
Samuel Beckett, Stéphane Verrue,
un long compagnonnage
C'est en 1985 que Stéphane Verrue commence son exploration de l'œuvre de Samuel Beckett. Il investit un énorme hôpital désaffecté à Boulogne-sur-Mer dans lequel il met en scène quatre dramaticules.
En 1988, à l'invitation de la compagnie de l'Oiseau-Mouche, il met en scène Acte sans paroles 1, Fragment de théâtre 2 et Va et vient.
En 1989, la compagnie se produit au festival d'Avignon (off). Acte sans paroles 1 est remplacé par Acte sans paroles 2 pour des raisons techniques.
En 1992, en co-production avec la compagnie de l'Oiseau-Mouche, nouveau programme Beckett, sous le titre générique Finir, finir encore…
De 1992 à 1995, Finir, finir encore… sera joué à Paris (Théâtre de la Cité Internationale), Londres, Bruxelles, et en Roumanie (où le spectacle est encensé par Andréï Serban).
En 1996, Stéphane Verrue remet en scène Solo et Cette fois (qu'il interprète lui-même). Ce programme fut joué à Paris (L'Atalante) en 1997 sous le titre générique de En allés.
Pas, Pas moi, Berceuse
Dramaticules féminins
de Samuel Beckett
Mise en scène Stéphane Verrue
Conditions financières - contacter Caroline Liénard.
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